Avec l’augmentation du niveau de vie, notre existence a tendance à durer plus longtemps, ce qui pose un certain nombre de défis liés au vieillissement de la population. Si l’on parle beaucoup du financement des retraites, un sujet reste moins médiatisé : celui de ce qui nous arrive le jour où nous perdons la faculté de gérer nos affaires. Car le grand âge signifie aussi un recours à davantage d’aide et s’il est bien connu que tout un chacun peut décider du sort de ses biens après son décès, l’on conçoit moins qu’il faille aussi se préoccuper de son sort dans la période qui précède…
Le 1er janvier 2013 est entrée en vigueur une vaste refonte du droit de la protection de l’adulte censée apporter des réponses à ces questions. En effet, le spectre de la mise sous curatelle d’alors a fait place à plus d’autonomie dans les possibilités officielles d’établir certaines règles qui devront nous être appliquées si nous ne pouvons plus les poser nous-mêmes sur le moment.
Entre autres nouveautés, le code civil connaît aujourd’hui l’institution du «mandat pour cause d’inaptitude» (art. 360 et suivants du code civil), sorte de curatelle privée par laquelle tout un chacun peut désigner une personne chargée de lui fournir une assistance personnelle, de gérer son patrimoine ou de la représenter dans les rapports juridiques avec les tiers au cas où elle deviendrait incapable de discernement. Il est possible de définir les contours de ce mandat, soit ce que la personne (le mandant) aura le droit de faire et quelles seront les limites de ses interventions. Ainsi, le jour où rien ne va plus, soit lorsque vous avez perdu la capacité de gérer vos affaires, c’est la personne que vous avez choisie qui va pouvoir prendre le relais et s’en occuper à votre place et selon vos instructions. Attention, cette sorte de transfert de vos droits est une chose sérieuse et il faut alors y mettre les formes. Ces dernières sont du même acabit que celles d’un testament : il faut soit passer devant un notaire, soit rédiger un acte olographe, c’est-à-dire à la main, daté et signé. Et tant qu’il est encore temps, n’oubliez pas de prévenir la personne concernée et de ranger votre mandat quelque part où on le retrouvera! Pour trouver de l’inspiration, tapez «mandat pour cause d’inaptitude» sur internet et vous verrez quelques modèles du genre.
Pour celles et ceux qui craignent plutôt pour leur santé, une autre institution moins formaliste existe : il s’agit des «directives anticipées», censées régler votre sort médical en cas d’atteinte sévère à la santé, ou grave au point que vous ne soyez plus en mesure de prendre des décisions. Ce sont les art. 370 et suivants du code civil qui en détaillent le fonctionnement. Il s’agit cette fois de définir les traitements médicaux auxquels vous consentez – ou non – au cas où vous deviendriez incapable de discernement. Ces directives anticipées doivent certes être écrites, mais elles ne requièrent par l’intervention d’un notaire, ni la forme olographe ; elles peuvent donc être consignées dans votre dossier médical après que vous les avez communiquées à votre médecin, voire théoriquement enregistrées sur votre carte d’assuré, le jour où le dossier électronique du patient sera complètement opérationnel. Le médecin s’enquiert alors de l’existence de vos directives en cas de besoin et les applique dans la mesure du possible. Ici aussi, tapez «directives anticipées» sur internet et vous trouverez plusieurs modèles à télécharger.
Certes, l’on peut avoir des pensées plus joyeuses pour son avenir que celles de songer à son incapacité de discernement ou à son décès. Mais finalement, la vie va toujours dans le même sens et alors à défaut de rajeunir, l’on peut prévoir un peu la façon de vieillir…
(article publié dans Bulletin du Cercle démocratique No 3 • août 2021, p. 30)